Impôts : comment l’État renfloue-t-il ses caisses ?

L’année 2018 augure des évolutions d’ampleur en matière d’imposition. C’est la direction générale des finances publiques (DGFIP) qui sera chargée de mettre en application les nouvelles dispositions du gouvernement.

Parmi les changements marquants, l’on peut notamment citer le prélèvement à la source, qui soulève de nombreuses interrogations auprès du contribuable. D’autres dispositifs moins discutés devraient également voir le jour ou être prolongés, à l’instar de la loi anti-fraude fiscale et de la loi Pinel.

Quels sont les objectifs poursuivis par ces dispositifs fiscaux et comment cela va-t-il se traduire dans les mois à venir pour les Français imposables ?

Le prélèvement à la source

impots 2018

Prescrit par François Hollande et appliqué dès le 1er janvier 2019, le prélèvement à la source fait l’objet de questionnements de la part de ménages imposables et des entreprises.

Alors que certains parlent d’un “choc de complexification” lié à cette mesure, d’autres apprécient de ne plus avoir à se soucier du paiement de l’impôt une fois appliquée la loi. Pour rappel, le prélèvement à la source désigne le fait de ponctionner l’impôt sur le revenu directement sur le salaire du contribuable. Ce processus vise à éviter les oublis et les absences de déclaration d’impôts.

Première évolution, le calcul de l’impôt se fera désormais sur les revenus de l’année en cours et pas sur l’année précédant la déclaration. Le taux de prélèvement sera, en revanche, calculé en fonction des revenus de l’année précédente. C’est donc le mode de recouvrement qui évolue, plus que l’impôt lui-même.

En matière de taux d’imposition, il sera possible de choisir entre différentes formules, qui donneront, in fine, lieu au versement de la même somme :

  • taux personnalisé : il est le taux qui sera appliqué par défaut. Il représente le rapport entre l’impôt dû au titre de l’année en cours et le revenu du foyer pour cette même année ;
  • taux neutre : il s’applique uniquement aux salaires versés par l’employeur selon une grille légale et permet au contribuable de dissimuler ses revenus annexes (loyers perçus dans le cadre d’un investissement locatif, par exemple) ;
  • taux individualisé : il permet au membre d’un même foyer fiscal (mariés, pacsés), de bénéficier d’un calcul séparé. Il s’avère avantageux dans le cadre de forts déséquilibres de revenus au sein du couple.

Attention toutefois, les taux “personnalisé” et “individualisé” donnent lieu au versement de la même somme. C’est simplement la ventilation au sein du ménage qui diffère en fonction des revenus de chacun.

Pour ce qui est des ressources autres que salariales (pensions alimentaires, revenus fonciers, etc), pour lesquelles un prélèvement à la source s’avère impossible, un acompte égal à un douzième de l’impôt payé l’année précédente sera prélevé mensuellement sur le compte bancaire du ménage.

Autre nouveauté, tout changement de situation devra être signalé dans les 60 jours : divorce, mariage, perte d’emploi, etc. Cela permettra aux ménages de payer un impôt qui sera au plus près de leurs revenus du moment.

“Un salarié qui perd son emploi en mars, par exemple, n’aura plus d’impôt à payer en avril s’il ne perçoit plus de revenus alors qu’actuellement, il doit continuer à acquitter les impôts qui correspondent à son revenu de l’année précédente.” – Laurent Benoudiz, président de l’Ordre des experts-comptables Paris / Île-de-France.

Pour éviter une double charge fiscale (impôts à N-1 et impôts 2018), l’administration fiscale a déclaré l’année 2018 “année blanche”, c’est-à-dire non imposable. Autrement dit, l’État accorde aux contribuables en 2019, un crédit d’impôt qui correspond à l’impôt calculé sur les revenus 2018. De leur côté, les revenus dits “exceptionnels” garderont leur caractère imposable en 2018 (indemnités de licenciement, primes professionnelles, prestations de retraite versée en capital, etc).

La loi de défiscalisation immobilière

la défiscalisation immobilière

La loi Pinel, qui vise à soutenir la construction de logements en favorisant les investisseurs, connaît un remaniement en 2018.

“Les contribuables domiciliés en France, au sens de l’article 4 B, qui acquièrent, entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2021, un logement neuf ou en l’état futur d’achèvement [VEFA] bénéficient d’une réduction d’impôt sur le revenu à condition qu’ils s’engagent à le louer nu à usage d’habitation principale pendant une durée minimale fixée, sur option du contribuable, à six ans ou à neuf ans. Cette option, qui est exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l’année d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, est irrévocable pour le logement considéré.” – Code général des impôts, article 199 novovicies relatif à la réduction d’impôt accordée au titre des investissements locatifs intermédiaires.

Jusqu’alors le dispositif s’étendait à la quasi-totalité du territoire français : zones Abis, A, B1, B2, à l’unique exclusion de la zone C. Depuis le 1er janvier 2018, certains secteurs géographiques “détendus” ont été exclus du mécanisme afin d’accroître son efficacité. Construire des logements neufs dans des zones “tendues” (où la demande surpasse l’offre) assure, effectivement, une mise en vente facilitée et une rentabilité locative optimale. Aussi, la zone B2 sera progressivement évincée de l’éligibilité Pinel : cela représente plusieurs milliers de villes radiées du dispositif. De ce fait, si vous achetez un logement neuf situé en zone B2 ou C, vous ne pourrez pas bénéficier de l’économie d’impôt octroyée dans le cadre de la loi Pinel.

Pour exemple, en Seine-et-Marne, ce sont près de 400 villes classées en zone B2 qui se verront prochainement privées de l’avantage Pinel tandis que la Haute-Garonne ne voit qu’une seule commune sortir du dispositif : Castelnau-d’Estrétefonds. La loi Pinel à Nantes et dans le département de la Loire-Atlantique exclut quant à elle des communes comme La Plaine-sur-Mer, Pontchâteau ou encore Vigneux-de-Bretagne, qui profitaient jusque là de la réduction fiscale Pinel.

La loi anti-fraude fiscale

loi anti-fraude fiscale

À la suite du scandale des Panama Papers ou encore de Swissleak, le ministre des Compte publics, Gérald Darmanin a pris le parti de renforcer la législation en matière de lutte contre la fraude, afin d’aboutir à un véritable “arsenal judiciaire”.

Présenté fin mars en Conseil des ministres, le projet de loi anti-fraude fiscale ambitionne de “doter l’administration de nouveaux outils [pour] mieux traquer la fraude” d’après les mots du Centre des impôts. La finalité de cette loi est, de toute évidence, de récupérer les sommes d’argent que l’État ne perçoit pas en raison de la fraude et qui représentent plusieurs dizaines de milliards d’euros.

La “police fiscale” est l’un de ces nouveaux outils : composée de 50 agents environ, cette instance agira sous l’autorité de la magistrature en renfort de l’actuelle brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF). La police fiscale, en place d’ici 2019, sera mobilisée dans le cadre d’affaires dont les enjeux budgétaires sont conséquents et pour lesquelles une expertise fiscale aiguisée est requise. Cette nouvelle autorité sera en mesure de procéder à des mises sur écoute ainsi qu’à des perquisitions au même titre que la police judiciaire.

Par ailleurs, les tiers complices de fraude, qui jusque là profitaient d’un certain flou juridique, se verront, eux aussi, sanctionnés par la loi à hauteur de 50% des honoraires perçus ou 100.000 euros d’amende. Cela concerne notamment des sociétés de conseil en fiscalité, des cabinets notariaux ou d’avocats).

Pour les dossiers les plus importants (condamnations pénales notamment), le nom des fraudeurs pourra être divulgué publiquement via la presse avec pour ambition, un effet dissuasif. De plus, pour les fraudeurs disposés à avouer leur délit, une procédure de “plaider coupable” permettra de passer outre l’étape du procès. C’est la peine proposée par le Parquet qui sera alors appliquée.

D’autre part, dans le cas d’une suspicion de fraude, les informations fiscales seront “croisées” entre les différentes administrations via des logiciels.

La France va également étendre sa liste noire des paradis fiscaux de 7 à 9 pays, en intégrant les critères retenus par l’Union européenne : transparence et équité fiscales, plan de lutte contre l’optimisation fiscale.

Enfin, des mesures plus claires seront prises à l’encontre des plateformes en ligne telles que Airbnb ou BlaBlacar. Elles devront impérativement transmettre à l’administration fiscale les revenus générés par les réservations des utilisateurs.

Le “verrou de Bercy” (monopole des poursuites pénales) n’est, quant à lui, pas encore remis en question.

L’impôt sur la Fortune Immobilière

impôt sur la Fortune Immobilière

Même si il ne concerne qu’un nombre restraint de contribuables (dans les 300.000 selon les dernières études), le remplaceant de l’ISF (Impôt de Solidarité sur la Fortune) devrait permettre à l’Etat d’engranger plus d’impôts dès cette années puisque l’IFI est entré en vigueur au er Janvier 2018.

Mieux que l’ISF, l’IFI s’accompagne d’une assiette de calcul de l’impôt beaucoup plus large que précédemment puisqu’elle integrera désormais ce que l’on dénomme comme étant la pierre-papier. À savoir les différents titres, parts de SCPI, OPCI… En appréciant dorénament les valeurs financières immobilières, l’IFI devrait permettre à l’Etat d’engrenger plus de recettes pour un même nombre de contribuables redevables de l’impôt.

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